Depuis 300 numéros, je suis abonné au Bulletin des Lettres ! Plus précisément depuis le numéro 399, publié le 15 juin 1978. J’avais découvert cette “revue mensuelle de critique et d’information bibliographique”, comme l’annonçait son sous-titre de l’époque, alors que j’étais étudiant à Lyon.
J’y suis toujours resté fidèle. Et j’ai reçu cette semaine le numéro 699 (février 2011): le mois prochain, le Bulletin des Lettres publiera son numéro 700 ! Ce sera, souligne la rédaction, “celui de mars, le Mois des poètes, salué par une belle rubrique Poésie. C’est donc à l’aile légère (mais solide) de la poésie que nous confions nos destinées immédiates”, conclut l’éditorial du numéro 699.
700 numéros, dont 300 comme abonné… cela mérite bien un billet ici ! Pour répondre à la question : pourquoi donc faut-il lire le Bulletin des Lettres?…
Le Bulletin des Lettres a été fondé en 1930. Il est publié à Lyon – une première caractéristique que j’apprécie, pas seulement parce que j’ai des liens avec cette ville, mais surtout parce que cela indique déjà une distance bienvenue par rapport au microcosme littéraire parisien. Durant de longues années, il fut édité à l’enseigne de la Librairie Lardanchet, dont je garde le souvenir du beau magasin lyonnais, à la rue Président Carnot. Hélas, la librairie finit par fermer. Un moment, l’on put craindre de la voir entraîner le Bulletin dans sa chute. Heureusement, il n’en fut rien. Et surtout, le Bulletin est parvenu à conserver son indépendance : il ne contient aucune publicité, il n’appartient à aucun groupe de presse ; publié par l’association des Amis du Bulletin des Lettres, il est son propre éditeur et n’a de comptes à rendre à personne. Ses rédacteurs sont tous bénévoles. Voilà qui devrait suffire déjà à le signaler à l’attention.
Quand je l’ai découvert, en 1978, la structure du bulletin était assez semblable : des chroniques et articles dans les premières pages, puis une “revue des livres nouveaux”, dans des catégories thématiques. La présentation était sobre – je ne dirais pas sévère, car je ne me suis jamais senti intimidé. Même si cette présentation était restée la même aujourd’hui, je serais toujours abonné et le lirais avec le même plaisir. Mais la rédaction a consenti de grands efforts de modernisation de l’aspect du Bulletin et a atteint aujourd’hui un résultat convaincant.
La couverture du Bulletin était verte en 1978 déjà. Avec un titre en noir. Le ton vert le marque toujours, mais il se décline de façon plus douce, moins austère, avec un bandeau vertical au fond gris, tandis que le titre joue sur une palette de couleurs et de caractères. Le sous-titre est simplement devenu : “Revue de critique littéraire”. La couleur a fait son apparition, créant un effet agréable au regard : depuis octobre 2010, la revue est en effet passée à la quadrichromie. Dans le numéro 699, la catégorie “Romans, récits, nouvelles” se décline en titres et sous-titres bleus ; ils sont verts dans la catégorie “Souvenirs, témoignages”, et ainsi de suite.
Notons que chaque numéro fait aussi place à des livres dans le domaine religieux, raison supplémentaire d’apprécier le Bulletin pour ceux qui s’intéressent à ces sujets.
Si je lis toujours avec le même plaisir le Bulletin des Lettres depuis 300 numéros, ce n’est pas simplement par sympathie pour une revue lyonnaise et indépendante. La vraie raison de mon attachement à cette revue est la sûreté de jugement de ses rédacteurs. Comme nous tous, je n’ai le temps de lire qu’une infime partie de la production littéraire. Je lis surtout des ouvrages universitaires, nombre d’entre eux en anglais. A regret, je ne lis que peu de romans, par exemple. Cependant, grâce au Bulletin des Lettres, je puis non seulement me tenir au courant des livres récents, mais aussi repérer des titres qui mériteraient mon attention, ou des livres à offrir.
Les rédacteurs du Bulletin des Lettres ne prennent aucun plaisir à étriper des auteurs ou à régler des comptes : les critiques s’efforcent à des jugements équilibrés et s’attachent souvent à relever les aspects dignes d’attention dans un ouvrage. Je relève, dans le numéro 699, des conclusions nuancées telles que : “Lecture instructive, aidée par de nombreuses cartes, indispensables. L’ensemble est tout de même un peu massif”; ou encore : “Quelques fautes de langue, çà et là, n’ôtent rien au mérite de ce court roman, riche aussi d’heureuses formules.”
En même temps, ils n’hésitent pas à se montrer sévères quand un ouvrage le mérite. Toujours dans le même numéro : “Bref, je n’ai pas aimé, et c’est un euphémisme.”
En général, je sais que je puis faire confiance aux avis des rédacteurs du Bulletin : d’autant plus qu’ils ne cèdent guère aux modes du temps. Seule la qualité compte pour eux. En outre, certains d’entre eux sont chevronnés et leur expérience leur confère un jugement d’autant plus sûr : trois des auteurs de revues de livres dans le numéro 399 figurent toujours parmi les signataires de comptes rendus du numéro 699 (Pierre Bérard, Henri Hours et Bernard Plessy). Bel exemple de persévérance au service des lecteurs.
Si je compare le numéro 399 et le numéro 699, je parlerais d’un changement de forme (sans rupture, mais avec un souci d’amélioration et de conquête de nouveaux lecteurs) et d’une continuité sur le fond. Sans doute, en 1978, les convictions s’affichaient-elles parfois plus vivement : c’était une période (dix ans après 1968) durant laquelle les débats idéologiques marquaient plus l’environnement intellectuel ; et les convictions des rédacteurs allaient clairement du côté de la tradition et non des révolutionnaires – tout en ne cédant jamais à la facilité d’absoudre des écrivains “amis”: l’on pouvait lire ainsi, dans le numéro 699, une sévère critique du dernier livre de l’écrivain catholique conservateur Michel de Saint-Pierre (“un malaise qui ne cesse de s’alourdir jusqu’à la dernière page”). Toujours cette même indépendance de jugement et ce refus de la complaisance, qui font que le Bulletin peut être recommandé à tout lecteur cultivé.
Le tout est servi par un style clair, l’absence de jargon, un respect de la langue française, ce qu’il faut de concision, et la solide culture des rédacteurs dans leurs domaines de prédilection.
Je resterai donc fidèle au Bulletin des Lettres, dont je conserve précieusement les 300 derniers numéros – et de nombreux autres à venir, j’ose l’espérer !
Mais il ne faut pas se cacher que le passage à la quadrichromie, tout en conservant un volume de 50 à 60 pages par numéro, avec des revues de plusieurs dizaines de livres, représente pour les Amis du Bulletin des Lettres une décision audacieuse. Il est indispensable que cette revue trouve ces prochains mois de nouveaux abonnés, afin que puisse se poursuivre une exploration littéraire qui dure depuis quatre-vingts ans.
Permettez-moi donc de vous encourager à vous abonner au Bulletin des Lettres : l’abonnement annuel pour 10 numéros au riche contenu ne coûte que 53 € en France, 55 € pour les autres pays. Il est possible aussi de conclure un abonnement de 33 € pour 6 numéros ou de 20 € pour 3 numéros, si vous préférez commencer par une période d’essai.
Veuillez envoyer l’abonnement muni du règlement (voir coordonnées bancaires plus bas) à :
Association des Amis du Bulletin des Lettres
39-bis, rue de Marseille
69007 Lyon
(Tous règlements à l’ordre de l’ ”Association des Amis du Bulletin des Lettres”)
Pour règlements bancaires : Crédit Lyonnais, Lyon, IBAN : FR72 3000 2010 0000 0079 1571 Q71 ; BIC : CRLYFRPP.
Site du Bulletin des Lettres (mais pas mis à jour récemment : les tarifs d’abonnement y étaient périmés à la date à laquelle ce billet a été rédigé): http://www.bulletindeslettres.asso.fr/
Jean-François Mayer dit
Le numéro 700, dont j’annonçais la prochaine publication, est paru ! Je viens de l’annoncer sur mon site de “brèves”: http://mayer.im/post/3989072886/2011–03-bulletin. Et c’est l’occasion de rappeler qu’il vaut la peine de s’abonner au “Bulletin des Lettres” et de soutenir ainsi cette revue indépendante et de qualité.