Volontaire ou forcée, une migration vers une nouvelle terre peut conduire un croyant à s’accrocher d’autant plus à sa foi ; mais l’expérience de la migration provoque chez d’autres une remise en question ou ouvre la porte à la réorientation vers des croyances nouvelles.
En 2010, j’avais dirigé un numéro du Refugee Survey Quarterly sur le thème “Réfugiés et religion”. Celui-ci contenait notamment un article du Professeur Louis Jacques Dorais (Université Laval, Québec) à propos de la religion chez les réfugiés vietnamiens, à partir d’enquêtes menées par l’auteur au Québec. De 1975 à 2005, en effet, pas moins de 1,5 million de personnes avaient quitté le Vietnam : nous gardons encore en mémoire le souvenir de ceux que l’on appelait les boat people, dans les années suivant la prise de contrôle du pays par les forces communistes.
Nombre d’exilés vietnamiens interrogés par Dorais expliquaient que la religion avait été pour eux une source de réconfort durant leurs épreuves : celles-ci avaient donc plutôt renforcé leur foi. Nombreux étaient ceux qui attribuaient à une intervention directe venue d’en haut d’avoir échappé à tous les périls pour trouver une vie meilleure : plusieurs évoquaient des faits surnaturels durant leur exode, par exemple.Mais certains avaient aussi connu à ce moment des expériences de conversion. Dans des directions opposées, d’ailleurs : tel catholique, après une manifestation du “Seigneur de la Mer de Chine” durant la navigation, s’était converti au bouddhisme ; à l’inverse, une famille bouddhiste était devenue catholique après avoir été sauvée par la Sainte Vierge.