Étonnante histoire que l’historien Régis Ladous raconte dans son livre, écrit en collaboration avec Pierre Blanchard, Le Vatican et le Japon dans la guerre de la Grande Asie orientale. La mission Marella (Desclée de Brouwer, 2010). Il est vrai que les ouvrages qui traitent des relations entre le Japon et le Saint-Siège durant les années tourmentées de l’avant-guerre et de Seconde Guerre mondiale au Japon ne prolifèrent pas dans les langues occidentales — c’est la première fois que j’en lisais un. Je ne suis pas ennuyé : j’y ai retrouvé le talent de Régis Ladous pour raconter une histoire. Quand, jeune étudiant à Lyon, je suivais ses cours, je les savourais déjà : il ne suffit pas de connaître l’histoire, il faut savoir la mettre en scène (et en contexte), la rendre palpitante pour l’auditeur. Régis Ladous connaît les ficelles du métier.
En voyant arriver ce livre, je confesse avoir été d’abord saisi d’un doute : un historien français peut-il raconter cette tranche d’histoire sans connaître le Japon et le japonais ? Eh bien, oui : l’angle d’approche choisi le permet, les archives utilisées apportent les éclairages nécessaires, et le résultat est convaincant. C’est à travers la figure de Marella que l’histoire est présentée. Et elle est passionnante.
Mais pourquoi donc un professeur d’histoire contemporaine à l’Université Lyon III s’intéresse-t-il à un pareil sujet ? Parce que cette tranche d’histoire soulève une question importante, et qui traverse le catholicisme depuis des siècles, en particulier depuis la querelle des rites chinois : jusqu’où peut aller l’inculturation du christianisme ? L’épisode est compliqué par la nature autoritaire du régime japonais à cette époque.
Tout le monde ne lira pas ce volume de plus de 400 pages, même s’il est accessible aux non spécialistes. Je vais donc essayer d’en résumer quelques aspects importants sur la question des rites — en laissant de côté d’autres aspects de l’activité de Mgr Marella que relate cet ouvrage.