Les engagements radicaux, religieux ou politiques, ne sont pas nouveaux — ni toujours connotés négativement. Mais ce qui est nouveau, c’est l’omniprésence de la notion de radicalisation et sa connotation majoritairement islamique, par suite d’événements survenus au cours des deux dernières décennies. L’actualité quotidienne fourmille d’informations sur la radicalisation : on veut comprendre le processus de radicalisation, on s’inquiète de la radicalisation de jeunes, des parents veulent lutter contre la radicalisation, on souhaite prévenir la radicalisation.
Comme l’a l’a écrit Scott Atran, « rarement dans l’histoire des conflits humains des gens avec aussi peu de moyens et de capacités ont réussi à effrayer autant de monde »[1]. Le nombre de programmes ou de centres de déradicalisation explose dans ce qui devient une véritable industrie[2]. Pour ne parler que de la France, à la fin de l’année 2016, il était question de quelque 80 structures (associations ou entreprises) ayant investi le business de la déradicalisation, alors que le gouvernement annonçait vouloir consacrer à ces efforts sommes importantes au cours des trois prochaines années. Au même moment, le site du CNRS rapportait que de nombreux projets soutenus par cette institution scientifique « portent sur le phénomène de radicalisation » — en précisant qu’il ne s’agissait pas de réduire celui-ci au djihadisme et à des attentats islamistes, et qu’il convenait de s’intéresser à « d’autres processus de radicalisation politiques et sociaux » (mouvements indépendantistes, extrême-gauche, extrême-droite…)[3]. Il existe maintenant des groupes de recherche sur la radicalisation[4], des revues spécialisées : l’auteur de ces lignes appartient au comité de rédaction du Journal for the Study of Radicalism (lancé en 2007 et s’intéressant aux mouvements sociaux radicaux en général), mais on voit aujourd’hui apparaître aussi des périodiques consacrés à la déradicalisation, par exemple le Journal for Deradicalization et le Journal Exit-Deutschland. Zeitschrift für Deradikalisierung und demokratische Kultur.
C’est dans le contexte de ce fort intérêt qu’est proposé ci-dessous un texte issu de deux conférences de l’auteur et qui en reprend l’essentiel, avec quelques adaptations et compléments : la première présentée lors d’une session de formation Radicalisation comprendre pour prévenir de l’Office protestant de la formation (Grangeneuve, 16 novembre 2016) ; la seconde à l’invitation de la Société vaudoise de théologie dans le cadre d’un cycle sur Le défi des radicalismes religieux (Lausanne, 9 février 2017). Tout en s’intéressant particulièrement à la radicalisation djihadiste, cet article s’efforce d’élargir les perspectives en évoquant d’autres types d’engagements radicaux, ayant débouché ou non sur la violence.
Ce texte peut être lu en ligne ou téléchargé (25 pages, 260 Ko).
Notes
- Scott Atran, « Keystone Al Kaeda », Foreign Policy, 5 novembre 2010, http://foreignpolicy.com/2010/11/05/keystone-al-kaeda/ ↑
- Élodie Guéguen, « Déradicalisation : un business pas très sérieux », France Inter, 10 novembre 2016, https://www.franceinter.fr/societe/deradicalisation-un-business-pas-tres-serieux. ↑
- « Face au terrorisme, la recherche en action », CNRS Le Journal, 8 novembre 2016 https://lejournal.cnrs.fr/nos-blogs/face-au-terrorisme-la-recherche-en-action/comprendre-la-radicalisation. ↑
- . En France, voir le projet en cours VIORAMIL (Violences et radicalités militantes en France), http://vioramil.univ-lorraine.fr/. Le site Radicalisation Research (http://www.radicalisationresearch.org/) offre des informations régulièrement actualisées sur des recherches et publications. ↑
Laisser un commentaire