Jusqu’à présent toujours remplis de marchandises soigneusement rangées et attendant les clients, les rayons commencent à se dégarnir. Un petit pincement au cœur pour le visiteur, qui devine les sentiments du maître des lieux : celui-ci a passé toute sa vie dans cet environnement, depuis son enfance. Cela faisait 72 ans que cette épicerie pimpante derrière sa vitrine bien entretenue faisait partie du décor de la ville de Fribourg, à l’ombre de la cathédrale. Elle était tenue depuis 42 ans par la seconde génération de commerçants, rappelle une affichette dans la vitrine. Mais elle va connaître le destin de tant de petits commerces avant elle : à la fin du mois de septembre, le magasin Chez Aeby fermera ses portes.
La fin de la case postale 83 : quand des adresses disparaissent
Après une cinquantaine d’années de bons et loyaux services, ma case postale 83 disparaîtra dans quelques jours : bien malgré moi, comme on le découvrira tout à l’heure. Je me trouve contraint de modifier une adresse qui m’avait accompagné dès mon adolescence. C’est l’occasion de quelques lignes sur le caractère plus ou moins éphémère des adresses, avant de raconter ce qui est arrivé à cette case postale — et à quelques dizaines d’autres en même temps.
Les fruits de mon pommier
Depuis dix-neuf ans, l’arbre se dresse dans le jardin. C’était un cadeau, offert par un collègue de travail. Une belle idée, venue d’une personne qui, comme moi, avait fait des études d’histoire : les historiens savent apprécier la durée et l’enracinement, au-delà de ces turbulences du quotidien, dont le flux constant nous submerge et captive notre attention. Arrivé tout petit, l’arbre a grandi, patiemment. Depuis peu d’années, il produit des fruits, d’abord en faible nombre. La quantité a augmenté cette année, et aussi la qualité, peut-être grâce aux conditions météorologiques, avec les alternances de pluie et de beau temps de l’été : c’est la première fois qu’il n’a pas fallu une seule fois arroser ici les fleurs et les plantes.
