“Non habemus antipapam : le prochain usurpateur n’a pas encore été annoncé à Rome”, écrivait le pape Michel sur sa page Facebook le 13 mars 2013, à la veille de l’élection du successeur de Benoît XVI. Né en 1959, son nom civil est David Bawden. Il a été élu pape en 1990 par un conclave de cinq personnes (dont ses parents) et réside avec sa mère dans un paisible village du Kansas, devenu ainsi un improbable Vatican en exil : avec sa poignée de partisans, il estime en effet que tous les papes postérieurs à Pie XII étaient tombés dans l’hérésie. À l’instar du pape Michel, d’autres catholiques, à l’époque contemporaine, se disent convaincus que “Rome n’est plus dans Rome” et que l’occupant actuel du Vatican est illégitime. Certains en arrivent à suivre d’autres papes, tandis que d’autres considèrent le siège pontifical comme vacant. La chaîne La Télé m’a invité hier soir à en parler, mais nous n’avions que quatre minutes à disposition — difficile de proposer un tour d’horizon de la question en si peu de temps. En quelques paragraphes, essayons d’aller un peu plus loin.
Catholicisme : signification et conséquences de la renonciation de Benoît XVI à travers les commentaires
Beaucoup ont exprimé de la compréhension pour un homme de 85 ans qui a renoncé à poursuivre l’exercice d’une charge écrasante ; nombre de questions s’expriment en revanche quant aux conséquences d’une telle initiative — à la mesure de la place accordée au pape dans l’imaginaire catholique romain. Seul le temps permettra de mesurer vraiment l’impact de la renonciation de Benoît XVI. À l’heure où s’est ouvert le conclave pour désigner un nouveau pontife à Rome, petit tour d’horizon de quelques commentaires.
Le catholicisme et les rites du shinto d’État au Japon : un livre de Régis Ladous sur Mgr Marella
Étonnante histoire que l’historien Régis Ladous raconte dans son livre, écrit en collaboration avec Pierre Blanchard, Le Vatican et le Japon dans la guerre de la Grande Asie orientale. La mission Marella (Desclée de Brouwer, 2010). Il est vrai que les ouvrages qui traitent des relations entre le Japon et le Saint-Siège durant les années tourmentées de l’avant-guerre et de Seconde Guerre mondiale au Japon ne prolifèrent pas dans les langues occidentales — c’est la première fois que j’en lisais un. Je ne suis pas ennuyé : j’y ai retrouvé le talent de Régis Ladous pour raconter une histoire. Quand, jeune étudiant à Lyon, je suivais ses cours, je les savourais déjà : il ne suffit pas de connaître l’histoire, il faut savoir la mettre en scène (et en contexte), la rendre palpitante pour l’auditeur. Régis Ladous connaît les ficelles du métier.
En voyant arriver ce livre, je confesse avoir été d’abord saisi d’un doute : un historien français peut-il raconter cette tranche d’histoire sans connaître le Japon et le japonais ? Eh bien, oui : l’angle d’approche choisi le permet, les archives utilisées apportent les éclairages nécessaires, et le résultat est convaincant. C’est à travers la figure de Marella que l’histoire est présentée. Et elle est passionnante.
Mais pourquoi donc un professeur d’histoire contemporaine à l’Université Lyon III s’intéresse-t-il à un pareil sujet ? Parce que cette tranche d’histoire soulève une question importante, et qui traverse le catholicisme depuis des siècles, en particulier depuis la querelle des rites chinois : jusqu’où peut aller l’inculturation du christianisme ? L’épisode est compliqué par la nature autoritaire du régime japonais à cette époque.
Tout le monde ne lira pas ce volume de plus de 400 pages, même s’il est accessible aux non spécialistes. Je vais donc essayer d’en résumer quelques aspects importants sur la question des rites — en laissant de côté d’autres aspects de l’activité de Mgr Marella que relate cet ouvrage.
Catholicisme français : nouvelles modes, nouveaux styles…
La semaine dernière, j’ai eu connaissance de deux initiatives venant de catholiques français et utilisant Internet comme support. Tout d’abord, sur le compte Twitter de Religioscope, j’ai reçu une invitation à suivre les tweets de “Bondieuseries jolies”, relais d’un magasin en ligne dont l’activité est ainsi résumée : “Les créations Sur la terre comme Ô ciel ont une vocation : enchanter la vie avec sens et fantaisie. Elles parlent de foi avec sobriété et ravissent les divines.” Le jour précédent, dans un message envoyé par le formulaire de contact du site Religioscope, un correspondant m’annonçait : “Je vous présente le premier videoclip catholique, Veni Creator!” Et m’invitait à visiter une page pour plus d’informations sur le CD de chant grégorien que ce videoclip voudrait promouvoir.
Je m’intéresse depuis assez longtemps à Internet pour ne pas m’étonner de telles initiatives. Dans les deux cas, en revanche, ce qui m’a intrigué était le style et/ou le vocabulaire sur lesquels s’appuient ces efforts de communication. Aurais-je été inattentif à des évolutions récentes ? Ou ces cas nous révèlent-ils de nouveaux styles d’expression de catholiques français se moulant sur leur environnement culturel ? Deux exemples anecdotiques n’autorisent certes pas à conclure : pourquoi pas, en revanche, saisir l’occasion pour partager quelques observations ?
Livre : saints et reliques en Russie à l’épreuve du communisme
L’un des aspects de la piété orthodoxe qui frappe souvent les chrétiens occidentaux est l’importance qu’y conserve le culte des reliques. Cela fait quelques mois que je me propose d’évoquer à ce sujet un récent livre d’un professeur d’histoire américain, Robert H. Greene, qui s’est intéressé au culte des saints et au rôle des reliques en Russie, mais aussi aux réactions du pouvoir soviétique face à cette manifestation de la foi durant les premières années de la domination communiste. Le livre se concentre sur la période 1861–1929 — période de renouveau religieux suivi par la tourmente révolutionnaire.