Au mois de novembre, j’ai publié sur ce site un article expliquant pourquoi je m’opposais à la réduction drastique du budget de la rédaction de RTSreligion par suite des mesures d’économie auxquelles se trouve contrainte la direction de la Radio-Télévision Suisse (RTS). La pétition lancée pour soutenir RTSreligion a atteint un résultat dépassant tous les espoirs : en sept semaines, plus de 23.000 signatures ont été recueillies. Le 8 janvier 2015, une conférence de presse a eu lieu à Lausanne pour annoncer ce résultat et exposer aux médias les raisons qui ont poussé un comité de soutien à se former et à lancer cette pétition. J’étais entouré de figures politiques, membres ou anciens membres du Parlement fédéral : la conseillère nationale Ada Marra (Parti socialiste), des conseillers nationaux Dominique de Buman (Parti démocrate-chrétien) et Jacques-André Maire (Parti socialiste) ainsi que de l’ancien conseiller d’État et ancien conseiller national Claude Ruey (Parti libéral radical). Chacun de ces quatre intervenants a apporté des réflexions substantielles et constructives : les personnes présentes ont d’ailleurs souligné la qualité de la conférence de presse. Plusieurs médias suisses y ont donné écho. L’après-midi, une délégation est allée remettre les signatures à deux responsables de la RTS. Nous verrons ce que permettront d’atteindre dans les prochains mois les négociations entre la RTS et ses partenaires, Cath-Info (catholique) et Médias-pro (protestant). Je publie ci-après le texte de mon allocution introductive, qui doit être replacée dans le contexte d’une conférence de presse.
Suisse : la radio-télévision veut supprimer les magazines religieux, mais le public réagit
À l’heure où l’on s’inquiète de l’inculture dans le domaine religieux et où nombre de voix soulignent la nécessité d’une solide information sur les religions, la direction de la Radio Télévision Suisse (RTS) prend une initiative bizarre, suscitant irritation et perplexité : dans le cadre des mesures d’économie décidées par la Société suisse de radiodiffusion et télévision (SSR), la RTS a annoncé sa décision de supprimer dès 2017 les trois magazines de la rédaction RTSreligion : À vue d’esprit (Espace 2), Faut pas croire (RTSUn) et Hautes fréquences (La Première), décapitant ainsi l’offre des magazines religieux des chaînes nationales de radio et de télévision en Suisse romande. À croire que les responsables de la RTS vivent dans une bulle, loin des préoccupations du monde, alors qu’on s’attendrait plutôt à voir des responsables de médias ayant la chance de disposer d’une telle équipe rédactionnelle spécialisée penser à lui allouer des moyens supplémentaires… Nombre de téléspectateurs et d’auditeurs qui apprécient les prestations offertes jusqu’à maintenant par la RTS dans le domaine religieux sont choqués par cette décision. Des initiatives sont en cours pour réagir et demander à la RTS de reconsidérer son approche. Dans ce cadre, j’aimerais expliquer pourquoi la décision de la RTS est maladroite et pourquoi le maintien d’une telle offre me semble important.
Stratégies de communication : décryptage d’une vidéo du Conseil central islamique suisse
Depuis 2009, le Conseil central islamique suisse (CCIS) est devenu un acteur minoritaire, mais très visible au sein de la communauté musulmane en Suisse. Animé par des convertis et des musulmans de seconde génération, aptes à s’exprimer dans les langues du pays (y compris en dialecte alémanique) et à l’aise avec les outils modernes de communication, il exerce un attrait notamment sur des musulmans qui estiment que les autres associations islamiques sont insuffisamment combatives. Le CCIS a déjà suscité à plusieurs reprises des controverses, critiques et soupçons. Une vidéo mise en ligne au mois de novembre, à l’occasion du cinquième anniversaire du vote populaire qui a interdit en Suisse la construction de nouveaux minarets, a suscité une vague de réactions : certains critiques n’hésitent pas à parler d’une “déclaration de guerre”. Une bonne occasion pour un exercice d’analyse dépassionnée.
Des vigiles et des veilleurs : à propos des nouveaux modèles d’activisme catholique
La venue de la philosophe américaine Judith Butler à l’Université de Fribourg pour y recevoir un doctorat honoris causa a suscité une petite polémique, dont l’origine n’était pas locale, et a entraîné une pacifique action de protestation par un petit groupe de catholiques. Je n’avais pas l’intention d’écrire quelque chose à ce sujet, mais l’occasion m’a paru bonne pour m’interroger sur le sens de nouvelles formes de protestation catholique. Le billet prévu est devenu un petit article, qui permet aussi de rappeler les faits et d’évoquer en filigrane la question de l’identité de l’Université de Fribourg, car elle n’a pas été étrangère aux réactions observées.
Quelques observations sur l’évolution des appartenances religieuse et le déclin du nombre de réformés en Suisse
Lors du recensement de 1960, 99 % de la population résidente en Suisse appartenait à l’une des quatre confessions “établies” du pays : l’Église réformée, l’Église catholique romaine, l’Église catholique chrétienne (“vieux-catholiques”) et la communauté israélite. Aujourd’hui, les quatre religions qui rassemblaient presque toute la population suisse cinquante ans plus tôt représentent environ 67 % de la population, selon le relevé structurel qui a (malheureusement) remplacé le recensement décennal. La montée de la non appartenance religieuse entraîne des conséquences pour toutes les religions “historiques” sur le territoire de la Confédération helvétique, mais l’impact est particulièrement marqué pour les protestants.
En 1960, l’Église réformée rassemblait encore une majorité de la population : 52,7 %, tandis que l’Église catholique romaine atteignait 45,4 %. Aujourd’hui, la part des réformés dans la population est descendue à 28 % (38,6 % pour les catholiques romains). Seul le canton de Berne compte encore une majorité de réformés. Et un chiffre frappe particulièrement : à Genève, longtemps tenue pour une Rome protestante, les communautés protestantes ne compteraient dans leurs rangs plus que 12 % de la population, tandis que l’Église catholique romaine est devenue la communauté religieuse la plus importante du canton avec 37 %.
L’émission télévisée d’actualité religieuse Faut pas croire m’invitait en cette fin de semaine pour en parler et s’intéresser en même temps à la montée de la population sans affiliation religieuse. Je saisis l’occasion pour compléter cette émission télévisée par quelques observations sur cette évolution, ses causes et les perspectives qu’elle ouvre, d’autant plus que j’ai été invité à plusieurs reprises, ces derniers mois, à m’exprimer sur ces sujets.